Good times witn my bros

5/09/2010

L.A. MUSIC


California waiting, bruit, fureur, et beaucoup de musique au cœur de l’ouragan Los Angeles

Los Angeles, car city, ville du balancement permanent entre triomphe et échec du capitalisme. L’impression d’être parfois dans un livre de Ballard. Entre une chaine d’hamburger, une station service et un restau mexicain, il se peut que l’on tombe sur une bonne salle de concerts. Là on y redoute de tomber sur la fameuse attention californienne face à tout ce qui arrive : je gare ma voiture, je souris, je parle fort, je n’écoute la musique que comme une distraction pour le chemin qui me mène aux toilettes et une fois la dernière note sortie des baffles, je reprends ma bagnole et je rentre. Si ce délicieux cliché se vérifie parfois dans les quartiers plus friqués de l’ouest de la ville, à l’est on trouve de nombreuses salles avec un public plus épars mais aussi plus attentif et plus passionné.

Echo Park


Epicentre officiel, donc un peu convenu, de cette effervescence musicale, The Echo réunit dans deux salles la crème de la scène californienne et américaine dans une ambiance proche de la boite de nuit de province avec son sol sal et son obscurité que seuls les lumières des bars viennent troubler. Tout ce qui se fait de bon sur le continent et qui se commercialise vaguement, passe par ici. Des sons au fort taux d’excitation de Dan Deacon au psychédélisme de Ganglians et Wavves.

The Smell


Mais tout ce bon son paraît bien banal quand des pas avertis se trainent jusqu’au saint des saints, The Smell. Toi qui recherches la surprise, qui attends d’un groupe inconnu une claque venue de nulle part, qui préfères entendre une mélodie lors qu’elle sort à peine du vacarme, reconnais tes pareils et prépare ta quête. Au milieu de la nuit, prends tes clefs, monte dans ta voiture, enclenche ta radio, descends le serpent des autoroutes urbaines jusqu’au downtown. Une fois tes pieds sur le trottoir, contemple cet aperçu de fin du monde que seul l’ultralibéralisme a su concevoir. Au milieu de gigantesques immeubles, dont les sommets se perdent dans la brume et la pollution, tu es bien seul. Les seules autres personnes que tu pourrais voir, ce sont les membres de gang, qui ont fait du downtown leur territoire. Sinon à peine plus au sud, s’étendent les rues où toutes les places de voitures sont libres, comme un avertissement, comme une menace, et où à la nuit tombée viennent les dizaines de milliers de sans abris, tels des cauchemars, seules formes qu’ils leur restent dans une société qui refuse d’en avoir conscience. Oui c’est bien ici que dans une arrière rue, tu trouveras The Smell. Pour y rentrer, tu devras faire deux sacrifices : tes oreilles, qui ne sortiront pas indemnes de la pluie de décibels qui les attend, et ton alcoolisme.

En effet, The Smell est une salle de concert, gérée par une association dont l’un des premiers buts est de rendre accessible à tous des concerts de qualité. Ainsi le prix d’entrée oscille entre 5 et 10 CHF. Et les salles qui servent de l’alcool étant souvent interdites aux moins de 18 ans voir au moins de 21 ans, les membres de cette association ont décidé de ne pas vendre d’alcool au sein du Smell. Wahoo un vrai geste révolutionnaire dans le monde ultranormé de la salle rock. Cette salle sert de tour d’essai aux jeunes groupes de la ville, de la Californie mais aussi des différentes parties des États-Unis. Les groupes plus aguerris y viennent eux pour se faire plaisir, la promotion du dernier album n’étant pas à l’ordre du jour. Le bénéfice obtenu par la vente des billets suffit à garantir le fonctionnement de la salle, et lorsqu’un investissement est nécessaire, les groupes plus connus viennent donner un concert de soutien, ainsi a eu lieu récemment une soirée pour l’achat d’un nouveau système de climatisation.

Presque chaque soir, ce sont ainsi 4 groupes qui se succèdent pour des sets d’une demi-heure. La salle est étroite, les murs couverts de dessins et de graffiti chaque soir étoffés. Des canapés défoncés par-ci par-là, c’est parfois carrément sur des ressorts nus que l’on s’assoit. Dans une première salle, se trouvent le bar et des meubles contenant journaux, livres et fanzines, que les gens lisent pour de vrai. Parmi eux de nombreux textes politiques. Dans la seconde salle se trouve une scène légèrement surélevée. Mais un des plaisirs que procure une soirée au Smell réside dans le fait que les groupes jouent souvent à des endroits différents. Si certains montent bien sur scène, ils sont encore plus nombreux à poser leur emplis juste devant afin d’être au même niveau que le public. D’autres encore se placent dans le coin opposé, renforçant la concentration du son. D’autres encore colonisent la première salle près des livres pour produire une ambiance plus intime. Entre chaque concert, résonnent les basses de la boite latino d’à côté, qui évidemment ne passe que du reggaeton et du Morrisey.

Voilà donc un énième paradoxe : une des meilleures salles autogérées et alternatives du monde se trouve dans la ville connue pour être un des symboles même de l’ultralibéralisme. Mais ceci s’explique avant tout par la richesse de la scène musicale locale et par l’appauvrissement de nombreux lieux urbains, les riches délaissant la ville pour s’installer dans les collines du nord de la ville ou dans la municipalité de Beverly Hills ou encore sur les côtes de l’océan, appauvrissement qui rend accessible les loyers des zones délaissées.

Pour finir, voici une liste de quelques habitués du Smell :
No Age (www.myspace.com/nonoage)
Abe Vigoda (www.myspace.com/abevigoda)
Sun Araw (www.myspace.com/sunaraw)
Fuckeande (www.myspace.com/fuckeande)
Mi Ami (www.myspace.com/miamiamiami)
Wet Hair (www.myspace.com/wethairgoldsounds)
Ariel Pink (www.myspace.com/arielpink)

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